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Appartenance

Par AOUINET Zidene et JAMET Alexandra

« Appartenance » une notion variable d’une langue à l’autre…

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Le terme «appartenance» se définit par le fait d’appartenir à un groupe, à un ensemble. En français, «appartenance» se réfère donc au verbe «appartenir» qui vient du latin ad pertinere, signifiant «tenir» et «tendre vers». 

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Lorsqu’on observe l’anglais, le terme «appartenance» correspond à belonging venant de to belong et entend l'appartenance de manière physique «appartenir à, contenir à». L'appartenance fait alors lien à ce qui nous touche littéralement et symboliquement.  Belonging renvoie aussi à to be alongside of, «être aux côtés de, se suivre côte à côte» et suggère que l'appartenance est une relation à l'autre, c’est avoir un chemin partagé sur lequel on s'engage côte à côte.

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Différemment, en portugais, «appartenance» se traduit plutôt par filiação, et mêle donc les termes «appartenance» et «filiation» en évoquant une parenté, une relation verticale d’un enfant (réel ou imagé) avec un parent (qui peut être une patrie, ou une communauté, religieuse, par exemple). Le verbe «appartenir», lui se traduit par pertencer qui évoque «la propriété d’une personne ou d’une chose, à une tierce personne ou chose», ou «former, faire partie intégrante de».

 

En arabe, l’ «appartenance» se traduit par  Ø§Ù„إنتماء [altakhsis], et est considéré comme un sentiment fixe qui constitue un facteur de construction de la société, car lorsqu’une personne appartient à sa communauté, cela l’amène à l’encourager à la préserver et à assurer sa croissance et sa prospérité permanentes. De plus, l’appartenance d’un individu à un lieu, contribue à lui faire apprécier le lieu dans lequel il se trouve et l’aide à renforcer les liens sociaux, car il réalisera des activités et des actions qui contribueront à accroître la sympathie entre lui et les autres individus de sa communauté.

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Mathématiquement, la formule x E X signifie que l’élément x appartient à l’ensemble X, et donc que x fait partie d’un groupe constitué de différents éléments, et ce groupe nous l’appelons X.

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À travers ces quelques définitions, nous constatons donc deux choses: d’une part que la notion d’appartenance varie d’une langue à une autre – et s’étend même au langage mathématique – car elle se construit dans un contexte qui est propre à chaque langue, mais d’autre part que l’on peut définir une appartenance «subie», et une appartenance «choisie». Là où l’appartenance peut être lue comme une filiation, elle est subie, dans le sens où elle est systématique, sans qu’il y ait de volonté choisie par l’individu (une filiation parentale, ou le lieu de naissance d’un individu); tandis que là où l’appartenance est lue comme un sentiment d’appartenir à un ensemble, elle est perçue comme une chose choisie et pour laquelle l’individu agira pour préserver cet ensemble, révélant un certain dévouement pour celui-ci. L’appartenance choisie peut être revendiquée et se transformer alors en patriotisme, nationalisme, régionalisme.

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Des noms qui révèlent des appartenances

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L’appartenance peut être durable ou passagère, et elle peut se faire en rapport à un groupe, à un lieu, ou même à une époque. Le sentiment d’appartenance peut aussi naître du nom donné aux choses et aux êtres, et lorsque que ces choses peuvent être ressenties par nos sens, celles-ci acquièrent une certaine tangibilité qui les font apparaître dans notre perception du monde.

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Les noms que l’on donne aux personnes révèlent souvent leur appartenance à une communauté, comme le nom de famille porté par un individu, qui indique à quelle famille il peut appartenir, mais aussi ses origines aux vues de ses consonances et de son orthographe. Ce même nom peut indiquer une histoire, comme la généalogie d’une famille ou des lieux d’attaches. Par exemple, dans les Antilles, certains descendants d’esclaves portent pour nom, les prénoms des anciens maîtres colons.

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Les objets et les lieux sont aussi sujets à ces phénomènes. Les places, par exemple, peuvent porter le nom d’un évènement historique auquel on la rattache. Les marchés peuvent emprunter le nom des objets qui y sont vendus, ou un nom lié aux métiers qui y travaillaient autrefois. L’exemple des marchés tunisiens illustre ce processus, car on peut deviner le nom du marché en fonction des articles proposés sur les étals. Ainsi, on retrouve le marché العطارين [Attarine], le marché du parfum, ou le souk النقاشين [Nakhasine], celui du cuivre.

 

Ces lieux se révèlent au monde, aussi de par leur nature, car ils sont source d’odeurs, de sons, de textures et de formes. Ainsi, nous sommes confrontés aux parfums, encens et ouds avant même de voir le marché العطارين [Attarine], et entendons les cliquetis et les coups porter sur le cuivre avant même d’être arrivé au souk النقاشين [Nakhasine]. Par conséquent, nos sens tels que l’odorat, l’ouïe, ou le toucher viennent s’ajouter à la vue pour nous faire prendre conscience des choses, et des êtres, et ainsi nous faire comprendre les relations qui les régissent et les appartenances qui se créent.

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Les appartenances mutent et se chargent d’histoire en se chevauchant. Elles créent des croisements riches entre des communautés, des civilisations et des traditions. Aussi naissent de nouvelles appartenances culturelles, comme l’exemple du nom Baal, qui désignait le dieu de la fertilité dans les anciennes religions païennes carthaginoises, et qui est aujourd’hui invoqué dans les religions monothéistes musulmanes pour parler de l’époux, ou d’une culture agricole qui ne nécessite pas ou très peu d’intervention de l’Homme, car elle pousse spontanément.

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L’appartenance dans le processus identitaire

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La notion d’appartenance se trouve au centre du processus identitaire et de territorialisation dans la mesure où elle fonde cette relation intangible, problématique et complexe qui lie les êtres, leurs communautés et leurs territoires (Amor Belhedi, 2006 : 310).

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L’ancrage des individus à un système culturel, de croyances ou de normes, a une grande importance dans ce qui constitue l’appartenance d’un être à une communauté. Il forme un héritage commun intergénérationnel qui assure la continuité des interactions entre les différentes générations dans une communauté. Cet héritage laisse une empreinte chez chaque individu appartenant à ce territoire, et se traduit dans sa façon de construire le quotidien dans celui-ci au sein de groupes particuliers.

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Une communauté s’exprime dans l’environnement dans lequel elle évolue par des aménagements, des appropriations et des engagements, et contribue ainsi à fonder une identité de groupe, puis, à leurs tours, cet environnement et les symboles qu’il porte, peuvent consolider les sentiments d’appartenance au groupe. 

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D’après René-Pierre La Scouarnec (2009), le sociologue Michel Bonetti examine les multiples appartenances de chaque individu au regard des lieux d'habitation. Il soutient, comme plusieurs psychologues et sociologues, que

«l'habitat sert de support au développement des identités individuelles et collectives, à travers les significations qui lui sont attachées». Habiter un lieu détermine donc des moyens d’expressions des individus et des directions identitaires.

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«Habiter avec», c'est donc vivre en relations et dans un rapport de familiarité avec les siens et un milieu.

«Appartenir à», c'est donc se sentir chez soi parmi les siens, face aux autres qui sont aussi chez eux. Ainsi, on retrouve aussi un rapport d'altérité entre les miens et les autres. Il n'y a pas d'appartenance s'il existe une seule maison. L'appartenance suppose qu'il existe nécessairement une maison pour mes semblables et une maison pour les autres. Nous appartenons à notre maisonnée et, de là, nous pouvons entrevoir l'autre maison. C’est de notre maisonnée et à partir des codes de notre entourage qu’on part à la rencontre des autres. (La Scouarnec, 2009: 48).

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BIBLIOGRAPHIE 

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BELHEDI, Amor. Territoires, appartenance et identification. Quelques réflexions à partir du cas tunisien. L’Espace géographique, 2006, vol. 35, no 4, pp. 310-316.

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LE SCOUARNEC, René-Pierre. Fondements humanistes de l'appartenance, 2009. Thèse de doctorat en psychologie. Université du Québec à Montréal.

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SITOGRAPHIE

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https://www.larousse.fr [dictionnaire Larousse en ligne, avec l’entrée « appartenance »], consulter le 14.12.2020 ]

https://www.dicio.com.br/ [dictionnaire brésilien Dicio en ligne, avec l’entrée « filação »], consulter le 14.12.2020

https://mawdoo3.com/ما_معنى_الانتماء  [article web « C’est quoi l’appartenance », de Omar lahham, 22 mars], consulter le 13.12.2020

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Expression des multiples héritages, composant le patrimoine tunisien.
Composition plastique avec collage sur A4, 2018 

© Zidene Aouinette

 Nos expériences définissent notre appartenance au monde.

Composition plastique futurisme avec collage sur A0, 2019

© Zidene Aouinette

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