NOMMER LES ÊTRES, NOMMER LES LIEUX
BIODIVERSITÉ
Par FRAISSENET, Camille
La biodiversité est un néologisme des années 1990 composé du mot « diversité » et « biologie ». Selon le Dictionnaire des jardins et paysages, « la biodiversité désigne la diversité du monde vivant au sein de la nature ». Les définitions sont nombreuses mais elles se rejoignent toutes pour dire que la biodiversité désigne la variété de tous les organismes vivants. La notion a été formalisée juridiquement dans la Convention sur la Diversité Biologique (CDB) en 1996 : le concept de biodiversité rassemble les diversités biologique et culturelle. La notion témoigne d’une prise de conscience collective de l’extinction des espèces vers la fin du XXème siècle. Dans le Dictionnaire de la protection de la nature, « les caractéristiques et l’originalité de la biodiversité d’un territoire sont souvent liées à la diversité culturelle ». C’est une notion imprécise qui « semble pouvoir rassembler dans un même combat la protection de la nature et la défense de la diversité culturelle » (Caillon et Degeorges, 2005).
La préservation de la biodiversité est un enjeu essentiel depuis le Sommet de la Terre de Rio de Janeiro en 1992. Elle doit être préservée, respectée, et entretenue. « Le jardinier du XXIème siècle devient respectueux de cette richesse biologique en limitant notamment ses interventions avec des pesticides » (Thébaud, 2007). Cette richesse est parfois insoupçonnée comme nous avons pu le voir avec le collectif Safi (lors d’une découverte des plantes le 11 décembre 2019) qui nous a raconté l’histoire de diverses plantes, leur rapport avec les Dieux et les différentes connotations qui leur sont associées. Chaque plante a une histoire et des évolutions selon son environnement. Bien que la diversité des plantes ait tendance à diminuer avec la présence de l’Homme, nous jardinons inconsciemment en marchant, en ramassant des plantes, comme expliqué par le collectif Safi. Ce sont souvent les endroits délaissés par l’humain qui sont riches en biodiversité. Ainsi, Françoise-Hélène Jourda explique qu’« un terrain vague, un talus, une zone en friche possèdent parfois une biodiversité remarquable. Souvent parce que les hommes n’y ont pas accès ». Finalement, on peut dire que la présence de la biodiversité permet d’évaluer l’impact des Hommes sur l’évolution de leur environnement. La biodiversité doit donc sa survie à une population « éco-responsable ».
« 2010 a été déclarée année mondiale de la biodiversité car celle-ci est en péril sur les continents comme dans les océans » (Jourda, 2011). Avec l’exploitation des terres pour récupérer un maximum de ressources et avec la pollution que cela génère, de nombreuses espèces ont disparu tant dans nos mers que sur nos terres. En architecture, les espèces d’arbres à capacité constructive se font rares en France et obligent les constructeurs à aller chercher ce bois en Sibérie, par exemple. Pourtant l’architecture pourrait être au service de la biodiversité, elle pourrait être un lieu de diversité, de développement comme les serres bioclimatiques. La biodiversité est mise en danger tant dans la disparition d’une espèce que dans la disparition des savoirs et des pratiques, liés à la culture de cette espèce. Alors qu’aujourd’hui les espaces verts sont rendus accessibles et sont même aménagés pour les citadins, il faudrait protéger ces espaces afin de permettre le retour et le développement d’espèces en voie de disparition. Il s’agit, comme le rappelle Françoise-Hélène Jourda (2011), de trouver un équilibre et de mesurer l’impact d’une décision d’aménagement au « niveau environnemental (biodiversité), social (qui profite de ces espaces et qui les entretient ?) et économique (coût de l’aménagement et de son entretien) ».
Dans les années 1990, les liens entre biodiversité naturelle et culturelle ont été révélés pour mettre en avant la coexistence entre la diversité des formes du vivant et la richesse des adaptations de l’Homme à cet environnement naturel. La diversité biologique constitue la ressource d’une richesse culturelle. Il existe différentes cultures au sein d’une société qui créent une biodiversité culturelle, c’est à dire une façon d’appréhender la complexité des liens qui unissent nature et culture. La biodiversité, lorsqu’elle concerne les plantes cultivées, les animaux d’élevage, ne saurait exister sans les sociétés qui la créent, la maintiennent ou la réduisent. Ainsi, la biodiversité culturelle est de plus en plus utilisée et caractérise la diversité des êtres vivants et des sociétés. La biodiversité culturelle est un patrimoine immatériel qui est tout autant menacé que la biodiversité naturelle : les langues et les croyances disparaissent, un nouveau modèle culturel planétaire apparaît etc. Le bouleversement climatique vient remettre en cause tant la biodiversité culturelle que la biodiversité naturelle.
BIBLIOGRAPHIE
Bioret Frédéric, Estève Roger et Sturbois Anthony, Dictionnaire de la protection de la nature, Presses universitaires de Rennes, Rennes, 2009.
Caillon Sophie, Degeorges Patrick, " Biodiversité(s), quand les frontières entre culture et nature s’effacent…", Écologie et politique, n°30, 2005, p. 85 -95.
Collectif Safi, découverte des plantes autour de l’École Nationale Supérieure d’Architecture de Marseille, 11 décembre 2019. [https://collectifsafi.com]
Jourda Françoise-Hélène, Les 101 mots du développement durable à l’usage de tous, Collection 101 mots, Paris, 2011.
Thébaud Philippe, Dictionnaire des jardins et paysages, Jean-Michel Place, Paris, 2007.