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BOIS

Par FIERRO, Letizia
 

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Ces réflexions sur le bois n’ont  pas la prétention de formuler une définition objective et universelle de ce mot. Le but est de rapporter un ensemble d’informations et d’histoires différentes, liées à des contextes lointains, dans le but de susciter chez le lecteur une réflexion, sur le mot bois et sur ses différentes significations et utilisations. L’intention est de souligner comment une entité, dans ce cas le bois, peut être vécue, perçue, définie et utilisée différemment en fonction du temps, du contexte culturel et géographique dans lequel il se trouve. Au terme de cette réflexion, une question  se posera : Toutes les définitions et catégories que nous attribuons à ce que la nature a créé en dehors de l’Homme, et donc le monde végétal et le monde animal, sont tout à fait objectives et universelles ou c'est le contexte dans lequel nous vivons, la culture dans laquelle nous sommes plongés, qui nous a transmis ces notions? Est-il possible de briser certaines croyances occidentales et de remodeler notre pensée, notre façon de vivre en prenant exemple sur des expériences extra-occidentales?   

LE BOIS DANS LA MYTHOLOGIE ET SES SIGNIFICATIONS SYMBOLIQUES 
 
Généralement, le concept de bois est immédiatement associé au monde végétal et spécifiquement à l’arbre. Dans la mythologie grecque et romaine, mais aussi pour les peuples Celtes et pour la culture indienne, les arbres sont les agents privilégiés de la communication entre les trois mondes : les enfers, la surface de la terre et le ciel. 
 
Dès les temps anciens, les Hommes demandaient aux plantes protection et réconfort, illumination et conseil. L’arbre est l’expression de la vie qui se régénère. Mystiques, sages, philosophes, artistes et alchimistes ont toujours associé à la symbolique de l’arbre les questions éternelles de l’Homme, le bien et le mal, la vie et la mort, la connaissance, l’humain et le divin. Il y a cependant un autre lien entre le monde des Hommes et l’arbre, celle du bois. Le bois pour faire du feu, pour chauffer est donc associé à la fumée qui monte vers le ciel, mais aussi le bois comme matière première pour l’artisan, qui le travaille en se basant sur une connaissance théorique et pratique acquise. En effet, il existe une homonymie complète entre les substantifs "science" et "bois" dans toutes les langues celtiques, tandis que dans la tradition judéochrétienne se trouve un lien entre le mot "arbre" et la "parole de vie".  
 
La totalité de la symbolique chrétienne tourne autour de ce symbole fondamental qu’est la croix et qui, comme l’arbre, exprime la verticalité qui s’élève de la terre vers le ciel. À une époque plus archaïque, les lieux sacrés représentant le cosmos miniature étaient faits d’arbres, de pierres et d’eau, ou d’une enceinte sacrée contenant un autel, une pierre et un arbre, comme on en trouve encore aujourd’hui en Inde. 
 
C’est sur un tel autel, au pied d’un arbre sacré, que le Bouddha s’assit lorsque, en se sacrifiant lui-même, il obtint l’illumination. Le culte des arbres était tellement enraciné dans les populations nordiques que le Concile de Tours, en 789 après J.C., tenta de le supprimer, en interdisant de vénérer les bois sacrés, mais les fêtes païennes continuèrent à être célébrées. Les hommes d’Eglise s’aperçurent bientôt que la religion chrétienne, malgré ses juristes, ne réussirait pas à éradiquer les valeurs enracinées dans les traditions préchrétiennes, alors, comme l’avait suggéré Saint Augustin, des croix furent gravées sur les arbres païens, et des reliques furent déposées dans les troncs. 
 
Dans la mythologie grecque, de nombreuses divinités sont associées aux arbres, comme la nymphe daphne au Laure et Dionysos à l’arbre de vigne. Il est également important de souligner que dans la mythologie de tous les peuples où se trouve un arbre particulier, se trouve aussi un serpent qui en est le gardien, outre le récit de la Création dans la Bible, il suffit de voir la Toison d’or, les pommes d’Or des Hespérides. 
 
Chez les Celtes, chaque arbre avec ses fruits avait une signification particulière, surtout le frêne, arbre sacré de la mythologie nordique. Même l’olivier était vénéré parce qu’avec l’huile obtenue de ses fruits s’allumaient les lampes, et cela apportait la lumière dans les heures d’obscurité, liées à la nuit, comme une continuation du jour. 
 
Les Romains considéraient l’arbre de vigne comme un symbole de force, de capacité d’adaptation. Dans une célèbre parabole, Jésus lui-même se compare à une vigne, dont les sarments représentent tous ses disciples (donc l’Église), qui ne peuvent vivre qu’attachés à la plante et non détachés d’elle. 
 
Comme tous les conifères, le Pin, étant toujours vert, symbolise l’immortalité. Les aiguilles de cette plante, organisées par paires, représentent la fertilité et le bonheur conjugal.  Même dans la littérature le poète Virgile nous raconte que les flambeaux pour le mariage étaient en bois de Pin. 
 
En Orient, le Pin symbolise l’immortalité. C’est pourquoi le bois de Pin est utilisé au Japon pour construire des temples et des ustensiles liés aux célébrations religieuses. Même au Japon, comme dans la Rome antique, le Pin est présent dans les rites nuptiaux : il était de coutume que les époux boivent du thé devant un arbre de Pin, symbole de l’amour éternel, comme ses aiguilles à feuilles persistantes.  
 
 
QU’EST-CE QUE LE BOIS POUR LA PHILOSOPHIE CHINOISE ? 
 
Dans la philosophie chinoise, le bois (木en caractères chinois), parfois traduit comme arbre, symbolise la croissance. Il représente le premier moment dans le cycle des cinq éléments chinois ou Wu Xing, qui suit le feu, la terre, le métal et l’eau. Le caractère du bois est le plus yang parmi ces cinq ; il représente le printemps, le point cardinal est, la planète Jupiter, la couleur verte et le temps venteux. L’émotion humaine correspondante est la rage, et du point de vue sonore le bois s’identifie aux cris. 
 
Dans la pensée taoïste chinoise, le bois représente le commencement, la repousse et la nouvelle vie. Ses attributs sont la force et la flexibilité, typiques par exemple du bambou. Le bois est également associé aux qualités de la chaleur, de la générosité, de la coopération et de l’idéalisme. 
 
La médecine traditionnelle chinoise introduit la théorie des cinq éléments dans laquelle le bois est le troisième. Cette théorie parle de cinq processus fondamentaux de la Nature qui ont une origine très ancienne contemporaine à la théorie du yin et du yang. 
 
C’est à partir de ces deux théories que l’on arrive à un tournant historique en Chine, c’est-à-dire qu’on passe d’une médecine où l’on croyait que la cause des maladies étaient les démons à une médecine avec une optique plus naturaliste, où l’on croyait que la maladie était causée par le mode de vie. Nous sommes à peu près en 1000 avant J.C. 
 
Les éléments de la Nature sont cinq : Eau, Bois, Feu, Terre et Métal ; ceux-ci sont à leur tour représentés et réellement présents également dans le corps humain. Chacun d’eux n’est autre que le produit de la transformation de l’autre, selon un cycle infini qui est à la base de la même vie : de l’Eau naît le Bois, du Bois naît le Feu, des cendres du Feu naît la Terre, des profondeurs de la Terre naissent les Métaux et l’Eau enrichie de Métaux. Et ainsi de suite jusqu’à répéter un cycle infini. 
 
Le Bois est le troisième élément. Sa qualité principale est qu’il peut être plié et redressé, il est donc solide et modelable. 
 
La médecine traditionnelle chinoise associe le Bois au foie et aux yeux, on dit en effet que toute problématique relative aux yeux "cache une problématique au foie”. 
 
Le bois est comparé à la figure d’un général : il se caractérise par l’imagination et la créativité, qui, face à un danger ou à un problème, élabore une stratégie. La vésicule biliaire est, à son tour, l’officier qui sauve ses propres hommes et conclut la stratégie commencée par le foie.  Les organes et les entrailles sont donc étroitement liés. 
 
Par convention, on dit que l’orgue est Yin tandis que la vésicule biliaire est Yang : l’harmonie ou le déséquilibre de ces deux forces énergétiques se répercute aussi sur la personne. Si le Bois présente l’énergie Yin de l’organe foie en équilibre, la personne se montrera créative, imaginative, pleine de rêves, d’idées et de stratégies. Si le Yin est en excès, il se manifestera anxiété; s’il est en défaut, nous aurons de la dépression avec un manque d’imagination. Il en va de même pour l’énergie Yang qui contrôle la vésicule biliaire : si elle est en équilibre, chez la personne nous aurons de l’initiative, de l’élan, du courage et de l’extraversion; si, au contraire, elle est en excès, cela engendreda de l’irritabilité, de la colère et de l’impudeur, tandis qu’un déficit énergétique Yang dénote une dépression caractérisée par de la timidité, du découragement et de l’insécurité. 
 
Le foie et, par conséquent, le Bois régulent le sommeil : l’insomnie qui se produit de une à trois heures du matin peut être due à un problème de foie. Même les ongles fragiles indiquent un déséquilibre du foie. En tant qu’organe aimant la paix, tout ce qui l’entrave, le comprime ou l’altère se manifeste par des troubles digestifs, des altérations émotionnelles (colère), des troubles du sommeil (insomnie ou réveils fréquents). 
 
Toujours selon cette théorie, le physique de chaque personne est lié à un élément.  Une personne Bois a une tendance à la maigreur, avec un port harmonieux, la musculature bien développée. Les membres supérieurs et inférieurs sont longs et élancés. Le visage est rectangulaire mais non carré, harmonieux, bien modelé; le menton est généralement évident et marqué et peut prendre des formes saillantes. Les dents sont allongées et les lèvres équilibrées. 
 
La personne du bois a une tendance naturelle à dominer parce qu’elle doit construire, créer, rénover, réformer et révolutionner. C’est la personne attirée par l’aventure, avec la soif de pénétrer l’inconnu et qui n’a pas peur de défier le destin pour surmonter l’adversité. Habile, adaptable et indépendant, le type Bois est celui qui avance seul en luttant contre toute sorte d’adversité pour dépasser ses limites.  La vie sédentaire ne convient pas à ce type. Cette recherche continue du maximum lui cause une éternelle insatisfaction qui, si elle n’est pas tamponnée en quelque sorte, se transformera en un état anxieux-dépressif. 
 
Optimiste, actif, très dynamique, le Bois a une intelligence ouverte et une bonne intuition. S’il est dans un environnement accueillant, il est cordial et attentif aux besoins des autres; mais s’il est même légèrement contredit, il devient intolérant, détaché et susceptible! 
 
 
QU’EST-CE QUE LE BOIS DANS LA RÉALITÉ OCCIDENTALE ? 
 
Aujourd’hui dans le monde occidental, la première définition, la première image qui apparaît dans nos esprits en pensant au bois, fait référence à sa nature matérielle.  
 
En botanique, le bois est un tissu végétal composé principalement de cellules allongées, disposées de façon cylindrique autour de la moelle de la tige, des branches et des racines d’arbres et d’arbustes, ayant une fonction de soutien à l’intérieur et une fonction vasculaire à 

 
  
l’extérieur; on parle de bois différent selon les différentes essences (sapin, noyer, chêne, cerisier) et selon sa consistance,  bois dur, affiné, vert, souple et doux. Le bois peut avoir des noms différents selon son utilisation prévue : bois, s’il fournit du combustible et du bois de travail, construction, s’il est orienté vers ces utilisations. Le bois est produit par la plante comme élément structurant, avec d’excellentes caractéristiques de robustesse et de résistance, et est donc utilisé par l’Homme.  
 
Une fois coupé, affiné et séché, le bois est destiné à une grande variété d’utilisations:

  •  Décomposé en fibres, il donne naissance à la pulpe de bois, utilisée pour produire le papier ;

  •  Il peut être sculpté et travaillé avec des outils spéciaux ;

  •  Il a été un important matériau de construction depuis les origines de l’humanité, quand l’Homme a commencé à construire ses propres abris ; il est depuis toujours en service ;

  • Il est utilisé comme combustible pour le chauffage et la cuisine. 

 
Le bois est classé commercialement en tendres et durs. Le bois dérivé des conifères (par exemple le pin ou le sapin) est de type tendre, le bois des angiospermes (aulne, chêne, noyer) est dur. Cette distinction découle de la nomenclature anglaise qui définit le bois des conifères "softwood" et celui des feuillus "hardwood", même si la traduction littérale de ces deux mots signifie simplement - et respectivement - (bois de) conifères et feuillus. Le bois provenant de différentes espèces a différentes couleurs, densités et caractéristiques du grain. En raison de ces différences, les différents types de bois présentent des qualités et des valeurs différentes. Par exemple, l’acajou épais et foncé est idéal pour les sculptures et les finitions raffinées, tandis que le balsa, léger, moelleux, à la texture spongieuse facilement taillable, est utilisé dans la fabrication de maquettes. 
 
En architecture, le bois est un matériau fourni par les arbres pour des travaux de charpenterie et de menuiserie, transformé et modifié en fonction de son utilisation et de ses propriétés physiques, chimiques et mécaniques qui permettent d’utiliser le bois comme matériau de construction pour des structures portantes mais aussi pour des éléments d’ameublement. En effet, le bois a été l’un des premiers matériaux de construction et a permis à l’Homme de résoudre les problèmes structurels les plus complexes et de produire une multitude d’outils utiles à la vie quotidienne. 
 
Il est utilisé plus spécifiquement pour réaliser des éléments structuraux tels que poutres, planchers, chevrons pour les couvertures, mais surtout pour les portes, fenêtres et meubles d’ameublement. 
 
Dans l’histoire de l’architecture, le bois a été largement utilisé comme matière première pour la construction de maisons et autres bâtiments jusqu’aux années 1920. Il a ensuite été remplacé par la brique et le béton. Aujourd’hui, elle gagne en importance, grâce également à une nouvelle conscience environnementale. 
 
L’usage le plus important pour l’évolution de la civilisation humaine est cependant lié à la découverte du feu et à son utilisation comme source d’énergie, qui permit aux Hommes préhistoriques de cuisiner, se réchauffer et se défendre des animaux. Son utilisation comme source d’énergie principale se retrouve tout au long de l’histoire de l’humanité jusqu’à la fin du XVIIIe siècle, moment où il a commencé à être remplacé par le charbon qui avait un pouvoir calorifique plus élevé et plus approprié pour les besoins industriels naissants. 
 
Le feu de bois, généralement déclenché par l’allumage de la branche, est encore utilisé dans de nombreuses habitations pour le chauffage. Le bois peut être une source d’énergie renouvelable s’il est brûlé dans des poêles modernes efficaces et s’il provient de forêts spécialement cultivées. 
  
Le progrès et la hâte avec lesquels nous vivons aujourd’hui en Occident nous amènent à jeter un regard très superficiel et matérialiste sur le monde qui nous entoure, en le considérant seulement d’un point de vue purement esthétique et fonctionnel. Tout ce qui est en dehors de l’Homme a une valeur selon son aptitude à satisfaire un besoin humain. Une matière à exploiter, un bien matériel à produire et à utiliser a pour but ultime la satisfaction du bien-être uniquement humain.   
 
Au contraire, comme nous avons pu l’expliquer, nos ancêtres mais aussi les populations orientales ont une grande considération pour la signification symbolique et les propriétés des plantes, du bois dans notre cas, en le considérant, non seulement dans sa composante matérielle à exploiter, mais aussi dans sa capacité à collaborer à la vie humaine dont il fait pleinement partie. C’est à travers la nature, les arbres, le bois que le peuple chinois interprète l’Homme, sa personnalité ou une éventuelle maladie. Cela permet à l’Homme oriental de voir de façon différente l’appareil végétal qui l’entoure, et par conséquent agit dans le respect de la nature et en communion avec celle-ci.  
 
En Chine, en effet, tout le bois n’est pas utilisé et plié aux besoins de l’Homme, et au moment où il est utilisé comme matériel, il porte avec lui une signification symbolique et culturelle et n’est pas un simple matériel de construction. En Europe, le bois est choisi comme matériel de construction, non pas parce qu’il a une signification morale, mais en raison de ses propriétés mécaniques intrinsèques, fonctionnelles, en fonction du projet à réaliser. 
 
On peut donc conclure qu’effectivement la relation entre l’Homme et la nature, en Occident, est subordonnée à la culture d’un peuple, qui dans le temps a construit des lois et des croyances qui régissent l’action humaine et qui rendent difficile l’approche de l’Homme à une croyance et une façon différentes de vivre le rapport avec la nature.  
 

BIBLIOGRAPHIE

Bonanomi F., Corradin M., Di Stanislao C., Introduzione al pensiero e alla medicina classica cinese, Bellavite Editori,  Missaglia (LC), 2012.

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Cooper J. C., Yin et Yang- l’ armonia taoista degli opposti, Astrolabio Ubaldini Edizioni, Roma, 1972.

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Gastaldi M., Bertolini L.,  Introduzione ai materiali per l'architetture, Città Studi Edizioni, Torino, 2011.

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Negro A.,Tulliani J.M., Montanaro L., Scienza e tecnologia dei materiali, Ed. Celid, Torino, 2005.

SITOGRAPHIE (consultée le 02 janvier 2020)

https://dizionari.repubblica.it/Italiano/L/legno.html  [signification du mot bois]

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http://www.georgofili.info/contenuti/albero-cosmico-simbolo-universale-tra-uomo-e-spiritualit/1560  [le bois dans la mythologie et ses significations symboliques]

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https://runelore.it/magia-esoterismo/alberi.html  [le bois dans la mythologie et ses significations symboliques]

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https://www.verdiincontri.com/articoli/art09105.htm [ la signification symbolique des arbres]

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https://www.macrolibrarsi.it/speciali/i-tanti-significati-del-legno.php  [la théorie des cinq éléments en médecine traditionnelle chinoise].

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