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SABLE

Par REGENT, Mélissa
 

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© Photographie : Utroja0 (source : Pixabay)

  Le sable commun, constitué de grains de quartz, est formé par l’érosion des roches sous l’effet de l’eau, de la température et du vent puis est transporté par les fleuves ou les vents. Selon les géologues et les physiciens, l’une des caractéristiques premières qui le définit est la taille de ces grains. En effet, selon les sables, ils ont un diamètre différent mais qui n’excède jamais deux millimètres.

 

Le sable est une matière singulière pouvant se métamorphoser et nous apparaître sous plusieurs   états, à la fois solide lorsqu’il est mouillé, liquide quand il est sec, mais poussière sous l’effet du vent. En contact avec d’autres matières, il est connu pour de nombreuses propriétés : il peut absorber, sécher, cuire, polir, rayer, mais peut également submerger ou encore transporter.

 

   Élément mouvant, le sable se dérobe sous nos doigts. C’est peut-être pour cela qu’on lui porte comme symbolique, l’instabilité, l’éphémère et la stérilité.

À mi-chemin entre fluides et solides, cette matière est l’un des matériaux les plus utilisé au monde par l’Homme jusqu’à être même recréé artificiellement.

Lorsque nous pensons au sable, une des premières images qui nous vient en tête est les paysages désertiques recouverts de sable.

En effet, dans le désert le sable fait partie intégrante du paysage pour ses habitants. Il occupe donc  une place importante dans ces sociétés qui vivent au quotidien avec ce dernier et se sont adaptées à sa présence.

 

  Dans l’Égypte ancienne, le sable était tantôt une contrainte, un élément redouté car imprévisible mais il était vu comme une matière aux qualités exceptionnelles. Selon certains de leurs textes sacrés, il était associé aux valeurs de pureté, de sacralité, de protection et faisait partie des pratiques funéraires réservées aux princes.

Dans différentes régions du monde, on retrouve ce caractère sacré que l’Homme porte au sable. Il devient alors support de représentation dans des cadres rituels spécifiques, des narrations mythiques, l’évocation du chemin vers le monde des morts... Il est également le support de prédictions. La Vitréomancie ou connue encore sur le nom de la divination par le sable est un art divinatoire employé par les peuples du désert. Les devins observaient les traces et les sillons laissés par le sable. Outre les prédictions, cette observation était également utilisée pour retrouver un voleur en plein désert.

 

  Le sol dunaire est composé entre 80% et 90% de sable, poussant les habitants du Sahara par exemple à adapter leur mode de vie en fonction de ce dernier. Cohabiter avec le sable, c’est vivre ses intrusions permanentes dans la sphère domestique. Les tentes sont, par exemple, plantées selon l’orientation qui protège le mieux des assauts du sable, les objets fabriqués du quotidien sont conçus pour garantir au mieux un confort face au sable. Les Hommes adaptent également leurs postures, pour tirer profit des qualités du sable et éviter tout désagrément. La marche même dans le sable est pratiquée d’une certaine manière.

 

  Mais au-delà des êtres humains, les paysages sableux arides abritent également un grand nombre d’espèces animales qui elles aussi ont adopté des stratégies d’adaptation face à ses conditions. On peut parler par exemple des techniques de camouflage et d’habitat des fennecs ou des vipères des sables.

L’enfouissement dans le sable est une technique employée par les animaux, mais est également pratiquée par les hommes en temps de guerre pour se protéger de l’ennemi ou encore pour sécher les aliments afin de les conserver ou pour les faire cuire, en ayant recours à la braise.

 

  Si le sable a influencé ses habitants, animaux ou humains, dans leurs manières de vivre, il est également source d’information et d’orientation. Un reg est un désert de pierre. Cette surface caillouteuse est recouverte donc de gravillons noircis par la patine du désert avec une marque plus claire en dessous créée par le sable. Lors des transports nocturnes, cette fine trace blanchâtre rendait visible la piste permettant aux transporteurs de se diriger.

 

   L’une des utilisations connues du sable est dans la fabrication du verre. Depuis sa découverte, le verre a connu une évolution progressive tant liée à sa fabrication qu’à son usage en gardant comme élément principal de composition : le sable.

La découverte de l’élaboration du verre remonte à la Mésopotamie. Elle serait le fruit du hasard que certains prêtent à la cuisson des poteries ayant engendré la fusion de sables calciques avec de la soude. D’autres, évoquent son apparition lors de l’utilisation de blocs de soude par des marins phéniciens, n’ayant pas de pierre, pour établir leur foyer. La chaleur du feu a transformé le sable et la soude en pâte de verre.

Autrement dit, l’obtention du verre se fait grâce au mélange du sable quartzeux, de calcaire, de natron et de potasse. Ce mélange, placé à une très haute température, fond et devient du verre. Le sable ainsi que toutes ces autres matières existent dans la nature, bien avant l’apparition de l’Homme et ont été détournées et appropriées par ce dernier. Il est à noter que tous ces éléments fondant à la chaleur des volcans ont formé le premier verre naturel appelé l’obsidienne.

 

  Outre le verre, l’une des autres grandes utilisations du sable par l’Homme va être dans la construction. En effet le béton, l’un des matériaux phare utilisé dans ce domaine fait également appel au sable.

Les premières traces du béton datent des Romains qui mélangeaient du sable, de la chaux avec des briques cuites pilées ou des cendres volcaniques. Ceci donnera naissance au matériau connu sous le nom de “béton romain”. Mais au fur et à mesure des années, bien que sa composition ait évoluée avec les recherches et expérimentations, le béton a gardé le sable comme l’un de ces matériaux principal de composition.

À la fin du XVIIe, début XIXe siècle, un développement des connaissances scientifiques et techniques se produit. La recherche d’un matériau inaltérable sous l’effet de l’eau et des autres éléments naturels, permettant d’agréger la pierre sous les eaux pour l’édification des phares, des ponts, des aqueducs et autres constructions va engendrer la naissance du béton artificiel que nous connaissons jusqu’à nos jours. On voit alors la mise au point du “ciment de Portland” par Louis Vicat, ingénieur des ponts et chaussées, bien qu’une formule similaire avait été trouvée par un ingénieur anglais du nom de John Smeaton lors de l’élaboration du phare d’Eddystone. Ce matériau sera la résultante d’un mélange de sable, de gravier et d’eau dont la découverte est datée de 1818. Son utilisation se propagera dans l’Europe puis dans le monde entier avec au fur et à mesure des évolutions, tel que le béton armé. On y voit alors une fois de plus une appropriation et transformation du sable par l’Homme, s’éloignant du caractère éphémère et instable qu’on lui confère pour la création d’un matériau solide et stable.

 

  Le sable est également un élément important qui vient composer un lieu, peu à peu apprivoisé par l’Homme : la plage. Pendant très longtemps, la plage était perçue comme un lieu isolé et inscrit comme effrayant dans les imaginaires communs. Autrefois lieu morne de la grève, se rendre à la plage est devenu un plaisir. Alain Corbin notera ce changement comme l’invention de la plage.

La plage à d’abord été vue comme une tradition médicale, lieu sur lequel se rendait l’élite pour profiter des bienfaits thérapeutiques qu’on lui attribuait. Elle s’est transformée au fur et à mesure du temps en un espace touristique, un lieu de loisirs où l’on ne se rend plus lorsque l’on est malade. La plage est un lieu vivant qui s’est transformé avec la société et a également sollicité une utilisation du sable excessive. En effet, elles ont été étendues, agrandies pour pouvoir supporter l’activité humaine florissante. Et pour cela, de grandes quantités de sable ont été importées, déplacées de leur lieu initial. Le sable, matière naturelle est utilisé dans ces cas-là pour composer une artificialité des paysages naturels de la plage. Certaines plages disparaissant sous l’érosion étaient par exemple rechargées grâce au sable de dunes situées non loin. Le sable va même être utilisé pour créer des plages entièrement artificielles pour assouvir ce besoin de présence de la nature pour l’Homme non loin ou à l’intérieur des villes.

 

 

  L’utilisation du sable par l’Homme a été grandissante au fil des époques. Mais le problème est que d’une part, l’extraction de cette matière, notamment pour la construction, ne cesse de grandir et que d’autre part, de moins en moins de sable arrive dans les mers à cause des barrages et de la lutte contre l’érosion des berges et des dunes. Cette carence en sable fait régresser les plages et participe à leur recul et à leur disparition. Mais il s’avère que les paysages du désert sont également menacés. On assiste à la désertification provoquée par des facteurs anthropiques (tels que l’agriculture intensive, le surpâturage...). Ces causes ont pour effet de faciliter le déplacement du sable et par conséquence celui des dunes.

 

  Le sable, matière naturelle a conditionné le mode de vie des habitants du désert. Ces sociétés, qui cohabitent avec le sable quotidiennement, se sont adaptées face à lui et ont évolué à ses côtés. Elles ont développé des attitudes face à cette matière, des savoirs-faire, des objets et des techniques. Il est devenu support, symbole, signe, partie intégrantes de croyances et de rituels. Il occupe une place importante et a donné naissance à une culture autour du sable. Tout ceci constitue ce lien étroit entre cette matière naturelle, les habitants de ces paysages et leurs cultures.

 

Le sable transforme l’être humain qui le côtoie et l’être humain a appris en retour à le transformer, à s’en servir pour certains besoins. Outre les sociétés du désert, il est utilisé pour créer d’autres matières comme nous l’avons vu, tels que le béton et le verre, mais aussi dans la fabrication des puces électroniques et les pneus. Son utilisation se retrouve également dans le rechargement en sable des plages. Cet usage participe au caractère artificiel de ces sites naturels autour desquels s’est développé une vraie « culture de la plage ». à ce jour, le sable est devenu la ressource la plus utilisée par l’Homme après l’eau, mais s’épuise au cours des années. 

RÉFÉRENCES

Boulay Sébastien, Gélard Marie-Luce, Vivre le sable: une introduction, Techniques & Culture, n°61, p. 10 -27.

 

France Culture, Une brève histoire du sable (4 émissions) :

Puisque rien ne dure. Une brève histoire du sable (1/4), Du sable entre nature te culture : la plage

Lien : https://www.franceculture.fr/emissions/la-fabrique-de-lhistoire/puisque-rien-ne-dure-une-breve-histoire-du-sable-14-du-sable-entre-nature-et-culture-la-plage

 

Puisque rien ne dure. Une brève histoire du sable (2/4), Habitez le désert

Lien : https://www.franceculture.fr/emissions/la-fabrique-de-lhistoire/puisque-rien-ne-dure-une-breve-histoire-du-sable-24-habiter-un-desert-de-sable-lexemple-du-sahara

 

 Puisque rien ne dure. Une brève histoire du sable (3/4), Les révolutions du verre

Lien : https://www.franceculture.fr/emissions/la-fabrique-de-lhistoire/puisque-rien-ne-dure-une-breve-histoire-du-sable-34-les-usages-domestiques-du-verre-de-lantiquite-a

 

Puisque rien ne dure. Une brève histoire du sable (4/4), La réinvention du béton

Lien : https://www.franceculture.fr/emissions/la-fabrique-de-lhistoire/une-breve-histoire-du-sable-44-la-reinvention-du-beton

 

 

https://www.futura-sciences.com/, site consulté en janvier 2020.

 

https://1001symboles.net/, site consulté en janvier 2020.

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