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BIOSOURCÉ

Par SHAW, Marion
 

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Le biosourcé est ce qui vient du vivant.

Ce mot est composé de deux racines ‘’bio’’ et ‘’sourcé’’.

Le terme ‘’bio’’ fait référence au vivant, à la biologie donc à la caractéristique organique.

La source est, quant à elle, l’origine d’un produit.  Le biosourcé est donc un élément d’origine biologique provenant de végétaux ou d’animaux.

 

Biologique: Nature, Végétal, Animal, Biomasse, Vivant, Vie, Matière, Croissance

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Le concept de biosourcé parle d'abord d’un élément qui provient de la nature, du vivant, un végétal qui pousse dans la nature, d’un animal qui mange. C'est quelque chose d’organique.

Ces matières et êtres vivants croissent, meurent, rapidement, contrairement aux minéraux par exemple, qui proviennent du vivant mais qui sont fossiles.

Dans le domaine de l'écologie, la biomasse se réfère à la masse totale des organismes vivants présents à un moment donné dans un biotope particulier (Futura sciences). Selon Alain Corbin (2018), les pensées tissent un lien entre les Hommes et la nature à partir du végétal.

De fait, il faut différencier la pensée du végétal pour lui-même et la pensée du végétal comme modèle pour l’Homme. Mais toutes les deux ont le mérite d’inverser le rapport entre l’Homme et la nature : non plus l’un contre l’autre, mais l’un avec l’autre. Non plus l’Homme maître de la nature, mais la nature pour elle-même ou comme biomimétisme, comme source de pensée et de vie pour l’Homme (voir Escobar , 2018).

 

 

Agriculture: Fibres, Ressources, Hommes

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Les matières biosourcées ont depuis longtemps été apprivoisées par l'Homme car il a commencé à intervenir sur le vivant, il y a des milliers d’années, avec le début des chasseurs cueilleurs. Ce qui était sauvage et naturel, a été domestiqué par l'agriculture et l’élevage, contrôlant les végétaux et animaux pour les besoins primaires propres de l'Homme. Ils sont devenus des ressources pour les êtres humains, ressources de nourriture, d'objets, de matières. On est alors passé d’une phase de nature totale à une culturation de la nature. Car l’Homme s’est alorsorganisé autour de ces pratiques, d’abord socialement et économiquement pour enfin créer des civilisations.

Les êtres humains ont alors commencé à mettre des mots et des liens de propriétés aux végétaux et aux animaux. Telle plante à telles propriétés ce qui veut dire qu’elle agit d’une telle manière sur l’Homme (Collectif Safi). « Bien des peuples non modernes concevaient les plantes et animaux, attribuant à telle espèce un statut d’ancêtre, traitant telle autre comme un proche parent ou comme un double de la personne » (Descola, 2002).

Les relations qui unissent le vivant et les Hommes se sont mis en place au cours de l’histoire de la vie et de l’évolution de l’Homme. Leur intensité, leur équilibre et leur manière de s’entrelacer ont varié.

 

Comme nous l’avons vu, la notion de biosourcé indique  des produits issus de ressources renouvelables telles que végétale, animale, résiduelle, algale. Mais quand le terme  de « biosourcé » est convoqué, c’est généralement uniquement pour souligner l’origine des matières premières à partir desquelles ces produits ont été fabriqués. Le terme biosourcé est adopté  pour mentionner l’élaboration d’un matériau par le vivant ou composé de matériaux issus de matières premières d’origine biologique.

Or, les matières d’origine biologique font généralement l’objet d’un ou de plusieurs traitements physiques, chimiques ou biologiques au cours du processus de fabrication.

On parle notamment de « plastique biosourcé » ou de « matériau de construction biosourcé », voire de « teneur en matière biosourcée» d’un produit.

 

 

Architecture: Matériau, Bâtiment, Biomimétisme, Structure

 

Depuis l’industrialisation et l’utilisation de matériaux à base de matières fossiles, l’Homme a voulu écarté la nature qui faisait partie de l’architecture vernaculaire et de son habitat. Mais, depuis quelques années, le retour à la nature par les matériaux biosourcés dans l’architecture est de plus en plus important.

Comme pour l'habitat paléolithique, ses matériaux, d'origine minérale ou végétale, étaient majoritairement prélevés sur le milieu physique immédiat.

Pour l'architecture vernaculaire, l'économie de la matière se reporte donc sur des matériaux locaux, communs, abondants et simples à utiliser.

Situer la source, en cherchant un approvisionnement en circuit court, local, utilisant des ressources du territoire proche. Sain, parce que les ressources doivent être saines dans leur composition, leur production et leur utilisation. Solidaire enfin, en reconsidérant tant les filières de production des matériaux que celles des mises en œuvre pour réapprendre le juste prix des choses et du travail humain. (Voir Perez,  2014).

Avec la considération grandissante de l’écologique, le biosourcé ou biomatériau reviennent dans l’architecture contemporaine car ils contribuent à l'environnement, à son équilibre.

L’intégration de la nature dans la culture a longtemps été utilisée par l’Homme dans l’architecture pour se protéger, se couvrir et habiter.

L'architecture a souvent cherché à copier le vivant. Avec le biomimétisme, on reproduit entièrement ou en grande partie les mécanismes du vivant.

Au-delà de toutes pensées écologiques, économiques, sociales ou culturelles, le biosourcé recèle un potentiel émotionnel extrêmement puissant. Cette dimension sensible de la matière dans l’espace apparait clairement dans l’architecture vernaculaire qui reflète le territoire. (Gauzin-Müller, 2019).

 

L'utilisation des produits biosourcés dans l'architecture a rapproché l’Homme qui voulait s’éloigner de la nature, par les liens sensibles que provoque la matière. Mais il y a encore quelque chose de plus, derrière tout cela : l’idée que les ressources, les idées, solutions ou remèdes ne se trouvent plus seulement en l’Homme, mais ailleurs: dans ce qui l’entoure et l’environne.

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Sensible: Sens, Sentir, Texture, Toucher, Percevoir, Vue, Couleurs, Ressentir

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L’usage des matériaux biosourcés crée une esthétique qui reconnecte les êtres humains à la nature, leur texture dégage des couleurs et des ombres captivantes et donne une envie de toucher la matière. Ainsi,  ces matières nous poussent à utiliser tous nos sens, que ce soit la vue (couleur), le toucher (texture), l’odorat (sentir les fibres) et même l’ouïe (le parquet en bois qui craque sous les pas). Par l’industrialisation des matières biosourcés en matériaux pour la construction, nous retrouvons notre sensibilité perdue au monde. Mais plus que les sens, on ressent l’énergie que procure les matières végétales et animales, comme la chaleur.

 

Chaque culture humaine voit ces matériaux différemment, comme en Asie, le bois ou le bambou est important, avec des significations différentes. La sensibilité à la nature revient avec une démarche spirituelle, telle celle des indigènes en Amérique du Sud, décrit par Philippe Descola

 

« Ainsi, la continuité du naturel et du culturel n’implique pas que la nature soit cause de la culture et jouisse d’un statut ontologique supérieur. Cela n’implique pas non plus que la culture se réduise à la nature. La relation entre nature et culture n’est pas causale, elle est interactive » (Zask, 2003).

 

Le biosourcé est un cycle d’états de la nature à la culture ; on passe de la nature totale et sauvage, à une appropriation par l’agriculture et les Hommes, qui ensuite transforment ces végétaux pour l’architecture et la culture et enfin un retournement se produit vers  une sensibilité qui touche les sens par la nature.

 

Comme le dit le philosophe Emanuele Coccia dans l’exposition Nous les Arbres, « il n’y a rien de purement humain, il y a du végétal dans tout ce qui est humain, il y a de l’arbre à l’origine de toute expérience ».

BIBLIOGRAPHIE

Collectif SAFI https://collectifsafi.com/

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Corbin Alain, La fraîcheur de l’herbe, Paris, Fayard, 2018.

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Descola Philippe, L’anthropologie de la nature, Annales 57-1, 2002, p.9-25.

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Escobar Arturo, Sentir-penser avec la terre, Paris, Éditions du Seuil, 2018.

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Futura sciences https://www.futura-sciences.com/

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Gauzin-Muller Dominique, Architecture en fibres végétales d’aujourd’hui, Plaissan, Museo, Coll. Transition écologique, 2019.

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Nous les Arbres, Exposition Fondation Cartier, Paris, 2019-2020.

​

Perez Patrick, Une anthropologie de l’habitat, Architecture, paysage et environnement comme totalité construite, 2017 [texte de présentation de HDR], disponible sur : http://lra.toulouse.archi.fr/lra/presentation/composition-du-laboratoire/Patrick_Perez/PresentationOraleHDR.pdf .

​

Perez Patrick, 50000 ans de «maisons pour rien» ou les enseignements du vernaculaire,  in : Julien Chopin et Nicola Delon (sous la dir. de), Matière grise, Pavillon de l'Arsenal, Paris, 2014, pp. 23-29.

​

Zask Joëlle, « Nature, donc culture. Remarques sur les liens de parenté entre l'anthropologie culturelle et la philosophie pragmatiste de John Dewey », Genèses, no. 50/1, 2003, pp. 111-125.

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